Tous les refuges du Mont-Blanc sont complets en ce WE d'août. Nous sommes en pleine préparation pour le Kilimanjaro. Greg, Agnès, Loïc, Sylvain, Bass et moi nous sommes libérés pour faire une course facile dans le massif du Mont-Blanc. Tout d'abord attirés par la traversée des Dômes de Miage nous avons dû renoncer, le refuge des Conscrits étant complet. Pas envie non plus de partir bivouaquer pour faire une course avec quarante autres cordées. Nous avons donc sorti la carte pour dénicher un sommet peu fréquenté faisable depuis un refuge qui ne ressemble pas à une boîte de sardines. Et nous avons trouvé la perle rare : les quelques sommets autour de l'Aiguille des Glaciers, accessibles depuis le refuge privé Albert Blanc, c'est-à-dire en abordant le massif du Mont-Blanc par le sud, sans passer par la vallée de Chamonix.
Rendez-vous est donc donné à Albertville où se retrouvent le samedi les Parisiens, l'Alsacien, les Jurassiens et l'Avignonais. L'accès par le Beaufortain est long mais magnifique. Nous poussons en voiture le plus loin possible sur la piste du vallon des glaciers jusqu'au point de cote 1950. La montée au refuge (2650 m) se fait rapidement en deux heures par un sentier qui ne s'encombre pas trop avec des zig-zags. Il fait beau et nous mangeons dehors en profitant du soleil couchant.
Le réveil est mis à 3 heures et nous partons peu après 4 heures, répartis en trois cordées. Nous progressons tout d'abord sur la moraine puis un névé avant de remonter le glacier. Quelques crevasses d'un fort beau gabarit nous permettent de tester la résistance des ponts de neige. Mais les conditions sont idéales. Le regel nocturne, bien que tardif, est présent, et la progression se fait en toute sécurité. Le Dôme des Glaciers est atteint en 3 h 30. L'arête qui mène ensuite à l'Aiguille de la Lex Blanche est un peu cornichée et il faut rester bien à gauche. Bien que facile à négocier elle est à la fois impressionnante et esthétique. Le vide à droite, l'Aiguille de Tré-la-Tête en face et les blocs de pierre à enjamber assurent l'ambiance. En 40 minutes nous atteignons le sommet de la Lex Blanche où nous prenons tout notre temps pour pique-niquer et prendre des photos. Nous rebroussons chemin à 9 h 30 et sommes surpris de croiser des alpinistes remontant le glacier après 10 h alors que la neige est déjà bien ramollie. Des parapentistes ont été plus matinaux et nous les voyons s'élancer depuis l'arête en contrebas du Dôme, vers 3200 m. Notre descente est beaucoup moins rapide que la leur mais nous sommes largement dans les temps pour que chacun prenne son train sans stress.
Cette sortie fut vraiment une découverte : une belle course de neige, facile, peu fréquentée (nous étions les seuls sur la Lex Blanche) dans le massif du Mont-Blanc. Elle aurait largement sa place dans les cent plus belles de Rébuffat. En tout cas cela nous encourage à sortir des sentiers battus pour trouver des courses méconnues, parfois aussi belles que les classiques.