L'objectif de cette sortie était de faire du mixte. C'est pourquoi, arrivés par le téléphérique de l'Aiguille du Midi la veille, nous avons entrepris l'Arête des Cosmiques après avoir planté la tente sur le plateau du même nom. Cette petite course, surpeuplée mais néanmoins magnifique, nous a permis de nous habituer au terrain mixte. De retour à la tente nous avons dîné en contemplant le Triangle du Tacul, véritable concentré d'itinéraires mixtes, et en particulier la Contamine-Grisole, que nous avons du mal à situer.
Le réveil n'est pas trop matinal car l'approche est courte et nous voulons négocier les principales difficultés de jour. Une fois le plateau glacier traversé, nous constatons que la voie est déjà tracée et qu'une cordée nous précède. Deux cordées dans le Triangle seulement contre une vingtaine dans la voie normale, sans compter les alpinistes partis à l'assaut du Mont Blanc par les trois monts encore plus tôt, nous voilà assurés d'une relative tranquillité.
Vincent et moi passons alternativement en tête, toujours en corde tendue, et nous rejoignons bientôt l'autre cordée qui fonctionne en leader fixe. Nous discutons tout en grimpant avec ces deux militaires basés à Toulon, aussi jeunes que nous. L'escalade est un régal, tour à tour neige, roc et même glace, toujours dans une difficulté modérée, ce qui permet d'apprécier à la fois la gestuelle et le paysage. Nous dominons bientôt l'Aiguille du midi puis nous parvenons au faîte du Triangle. La pente s'adoucit alors et nous cheminons encore une heure et demie en contrebas de l'arête pour atteindre le sommet du Mont-Blanc du Tacul.
La descente est rapide, une véritable tranchée ayant été creusée en face nord par le passage des alpinistes. Nous devons juste désescalader une courte section de glace en piolet-traction avant de slalomer entre les grands séracs. Je trouve cette voie normale piégeuse. Réputée facile, elle est parcourue par des dizaines d'alpinistes, souvent débutants, alors qu'elle est striée de crevasses, menacée par les séracs, et qu'il y a toujours une ou deux sections plus raides et verglacées, surtout en fin de saison. Nous somme surpris de croiser des hommes commençant l'ascension à presque 11 heures du matin ! Pour nous c'est plutôt l'heure de démonter la tente et d'aller s'attabler devant une bière et une pizza à une terrasse de Chamonix.