Images de l'ascension (les images apparaissent dans une fenêtre séparée)
Premier aperçu du Vignemale Premier aperçu du Vignemale
La face nord du Vignemale vue du refuge La face vue depuis le refuge
Gros plan sur les goulottes et le couloir de Gaube Gros plan sur les goulottes et le couloir
Dans le couloir Dans le couloir
La cascade de sortie La cascade finale
Greg à la sortie Greg à la sortie
Le couloir vu d'en haut Le couloir vu d'en haut
Le sommet Est Le sommet Est
Greg arrive au sommet Greg arrive au sommet
Le couloir de gaube depuis le glacier Le couloir de gaube depuis le glacier
Un isard Un isard sur le chemin du retour
accueil alpinisme

Le Vignemale (3298 m)

Couloir de Gaube

Ceux qui, comme moi, pensaient que les Pyrénées n'étaient qu'un modèle réduit des Alpes doivent revoir leur copie. Les sommets pyrénéens ont beau être quelques centaines de mètres moins hauts que leurs homologues alpins, moins connus et moins courrus, ils n'ont rien à leur envier au niveau de l'esthétique, de la technicité et de la variété. Ainsi la face nord du Vignemale fait tout autant rêver l'alpiniste que la face nord des Courtes, de la Meije, voire des Gandes Jorasses. Couloirs de neige, goulottes, sombres murailles rocheuses, tous les ingrédients du grand alpinisme sont au rendez-vous. On découvre cette face aprè une heure de marche depuis le parking du Pont d'Espagne, terminus de la route venant de Cauterets, en même temps qu'un superbe lac encore partiellement gelé en cette fin avril. Mais le regard est irrésistiblement attiré par la paroi où le couloir de Gaube semble avoir été taillé d'un coup d'épée. La montée au refuge des Oulettes-de-Gaube en ski de randonnée est vécue comme un zoom au ralenti ; on s'approche avec une lenteur désespérante de cette face qui occupe progressivement tout le champ de vision. Finalement, alors qu'il ne reste plus entre nous et la montagne qu'un glacier en pente douce on arrive au refuge, adossé aux rochers comme pour contempler lui aussi le Vignemale jusqu'à la tombée de la nuit.

Mais nous ne sommes pas venus en contemplatifs. Réveil à deux heures sur les conseils du gardien. Les conditions sont bonnes, on enfonce un peu pendant l'approche mais on bénéficie des traces de ceux qui sont passés avant nous. Et c'est là le revers de la médaille : le couloir de Gaube est très fréquenté, et le fait d'avoir décoté cette grande classique des Pyrénées de TD à TD- et même parfois D+ attire encore plus de monde. Il ne faut pourtant pas s'y engager à la légère car ce couloir de 600 m à 60 degrés est défendu à son sommet par une longueur de cascade cotée 4+.

De fait le passage de la rimaye et la remontée du couloir ne posent pas de problème particulier. Nous sommes au moins 6 cordées dans ce couloir très encaissé, et nous rejoignons le groupe de tête au pied du premier mur de glace. Trois Espagnols et deux Français sont en train de se préparer quand nous arrivons et le passage étant trop étroit pour passer à deux de front il nous faut prendre notre mal en patience. Fait rare, c'est une femme qui passe en tête chez les Espagnols. Elle avance lentement et même si elle ne fait pas d'erreur on sent qu'elle n'a pas tellement de marge. Les deux Français suivent, et nous attendons presque une heure avant de pouvoir passer à notre tour, frigorifiés.

Après une nouvelle bande de neige le même schéma se reproduit au pied de la deuxième longueur de glace, celle en 4+. Les deux relais sont déjà pris quand nous arrivons, l'Espagnole se prépare, et un véritable embouteillage se forme quand les deux autres cordées d'Espagnols que nous avons doublés plus bas dans le couloir arrivent à leur tour. Mais ils attendent sagement en contrebas, à l'abris des chutes de parpaings de glace détachés par les grimpeurs successifs.

L'Espagnole avance très lentement, le Français qui la suit aussi, puis tout dérape alors qu'il est presque à la sortie des difficultés. Il chute la tête la première et je le vois rebondir sur les rochers en faisant un salto complet, puis s'immobiliser à quelques mètres de nous pendu au bout de la corde la tête en bas. Heureusement il ouvre les yeux, se remet sur ses pieds et son compagnon de cordée le mouline près de nous. Apparemment plus de peur que de mal, il marche, ne semble pas blessé, et a été protégé par son casque et son sac à dos lors de sa chute.

Nous passons encore pas mal de temps à prendre de ses nouvelles, récupérer la corde et le matériel. Intacts mais choqués (on le serait à moins), Gilles et Laurent nous demandent de leur monter leur corde afin qu'ils puissent sortir cette dernière longueur en toute sécurité. C'est Greg qui passe en tête, et il nous assure tous les trois depuis le haut. Il est presque 11 heures quand nous sommes tous au sommet du couloir. Gilles et Laurent choisissent de redescendre aussitôt tandis que Greg et moi montons les cent derniers mètres faciles jusqu'au sommet du Vignemale. Ce versant est beaucoup moins hostile que la face nord et de nombreux skieurs et alpinismes ont profité de ce week-end ensoleillé pour s'offrir le Vignemale ou un de ses satellites.

A la descente notre attention est attirée par le bruit d'un hélicoptère et, comme nous le craignions, il dépose les secouristes aux côtés de Laurent que nous apercevons en contrebas. Sa chute n'a pas été que spectaculaire et il souffre à la cheville et au genoux. Nous aidons les secouristes à l'embarquer dans l'hélicoptère puis poursuivons la descente avec Gilles qui n'a pas pu monter à bord faute de place. A cette heure de l'après-midi la progression dans la neige est un véritable calvaire car nous enfonçons jusqu'aux genoux, et il faut en plus remonter presque 300 m pour franchir le col qui nous ramène sur le refuge des Ouletes-de-Gaube. C'est bien fatigués que nous y parvenons enfin, pour refaire les sacs et poursuivre en skis puis à pied la descente vers le Pont d'Espagne qui met fin à cette nouvelle "grosse bavante" de 16 heures.